Coordonnateurs du numéro thématique :
Elzbieta Sanojca
Centre de recherche sur l’éducation, les apprentissages et la didactique (CREAD), Université de Rennes-2, Rennes, France
elzbieta.sanojca@univ-rennes2.fr
Emmanuel Triby
Laboratoire interdisciplinaire des sciences de l’éducation et de la communication (LISEC-UR 2310), Université de Strasbourg, France
Argumentaire scientifique
La négociation des savoirs a forcément quelque chose à voir avec la formation, et plus largement avec les situations qui engagent un développement des personnes. Partant de l’usage de cette notion en anthropologie, nous voudrions, dans ce dossier, renouveler l’analyse de questions récurrentes dans notre champ de recherches : la formation en situation de travail, les apprentissages expérientiels, la place de la collaboration dans le développement des personnes, l’alternance, la fonction d’accompagnement… Cela passe à la fois par une reprise de nos instruments conceptuels et théoriques, que par la diversification des situations que nous considérons comme relevant du champ de la formation.
Ancrage anthropologique
Dans une approche anthropologique, les savoirs recouvrent davantage que les savoirs formels ou les savoirs de référence ; les savoirs d’expérience y ont bien évidemment leur part, traversés par des savoirs normatifs et des croyances, plus ou moins ancrées et partagées ; les valeurs y sont nécessairement en jeu, de même que les affects ou les émotions qui donnent leur teinte aux savoirs. Ainsi se forment des configurations de savoirs. Celles-ci renvoient à un ensemble de différents savoirs structuré par des interrelations, des complémentarités, mais aussi des rapports, de domination, de dépendance, voire d’exclusion (Elias, 1993 ; Foucault, 2001). Ce sont des ensembles dynamiques se transformant au gré des changements affectant les rapports sociaux et politiques. Au niveau méso-social, les configurations se modifient en fonction des enjeux qui lient les porteurs de ces savoirs respectifs dans des conjonctures transactionnelles singulières (éventuellement conflictuelles) et de la manière dont ces acteurs parviennent à y établir des accords.
Le Meur et Sabinot (2019) font usage de la notion de négociation des savoirs (NS) pour décrire et analyser les rencontres successives entre les représentants des populations autochtones et représentants de la métropole en Nouvelle Calédonie, en vue d’organiser l’usage respectif des ressources du territoire, environnementales et minières. Il y a une certaine configuration d’acteurs locaux, qui se distinguent par les points de vue (ce qui les définit comme acteurs dans cette configuration) mais plus encore par des ancrages et des appartenances particuliers, et par un certain usage des savoirs dans la négociation, lui-même ancré dans une configuration de savoirs, propre à chacun des acteurs. Un jeu de configurations, des acteurs et des savoirs, se met en œuvre, en écho au jeu de dispositions, externes et internes, qui gouverne les apprentissages (Boltanski, 2009 ; Martucelli, 2017 ; Paugam, 2023).
Le Meur et Sabinot relèvent notamment que chaque moment de négociation comporte un « enjeu critique » ; lors de leurs rencontres, les acteurs « mobilisent des savoirs de manière différente selon les lieux et la “cause “qu’ils entendent défendre ou porter » (p. 43). « L’enjeu critique », c’est ce qui doit avancer, ou être dépassé, ou se transformer, pour assurer un accord sur le vivre-ensemble ou une activité partagée. La « cause », c’est une façon d’introduire une finalité, dans cette mobilisation de savoirs, et nommer les valeurs qui imprègnent les savoirs respectifs des acteurs.
Tout événement mettant en présence des registres de savoirs différents (environnemental, juridique, politique, etc.) génère la production de normes et de savoirs potentiellement hybrides ainsi que des reconfigurations dans les positionnements des acteurs. (…) Ces reconfigurations engendrent à leur tour des transformations des savoirs et des mécanismes d’actualisation des valeurs à l’interface entre registres locaux et extra-locaux, traditionnels, administratifs, juridiques et scientifiques. (…) C’est à la charnière de ces différents registres que s’observe la dimension sociale et politique de la production de savoir et de valeur, sachant que les dimensions cognitives et normatives sont difficiles à désenchevêtrer » (Le Meur et Sabinot, 2019, p. 44).
À l’instar de la configuration et la « reconfiguration », la notion de « registres » paraît essentielle pour parler de négociation de savoirs, registres conçus à la fois comme cadre sémantique et ressources vives pour nourrir la communication. La diversité des registres de savoirs et de valeurs correspond au point de vue élaboré par chaque partie prenante en fonction de ses intérêts et de sa lecture de la situation. Pour chaque acteur, les savoirs forment des configurations, en s’inscrivant dans des registres particuliers et distincts, qui se reconfigurent au gré de la négociation (Latour, 2005). En somme, la négociation, c’est d’abord un ensemble de rapports qui entrent en interaction (Wolton, 2022) : rapports de force ou d’intérêt divergent, mais également rapports de dépendance réciproque (Foucault, 2023). Il s’agit de rapports sociaux, entre individus et groupes, mais également des rapports intériorisés : les « rapports à » et notamment le rapport au savoir, le rapport à soi et aux autres (Charlot, 1999). L’activation de ces rapports passe nécessairement par la construction d’une relation, active, support et trajet des transformations des savoirs en jeu. Ces rapports actualisent et modèlent les configurations à travers l’activation de relations, plus ou moins durables et partagées.
En approfondissant cette approche anthropologique, nous relèverons que la négociation des savoirs est tendue entre l’échange, la transaction, dans son exercice et ses ajustements, d’une part, la traduction voire la conversion, dans son penser (ou son idéel), d’autre part (Blanc, 2009 ; Citton, 2021 ; Winck, 2007). Du point de vue conceptuel, elle trouve une expression à la fois exemplaire et significative dans la théorie de la traduction (Callon, 1991 ; Callon et Latour, 1991). Cette occurrence est particulièrement intéressante car elle montre que la négociation des savoirs peut concerner des processus locaux, professionnellement et économiquement circonscrits. Cela semble important car, dans notre modèle de conception, ce processus peut concerner toutes les échelles des activités humaines, du plus macrosocial, sociohistorique, au plus microsocial des situations singulières : une diversité d’acteurs (par la position et le point de vue), des savoirs explicitement mis en jeu dans leur interaction, un enjeu particulier, i.e. une question sociale à leur échelle, qui impose cette interaction pour trouver une issue durable. En somme, le territoire comme situation de développement » (Gagneur et Mayen, 2010).
Reprise par les sciences de l’éducation et de la formation
Dans l’ère francophone, à notre connaissance, le concept de négociation des savoirs (NS) n’a pas été travaillé sous cette dénomination dans notre discipline. Dans une perspective un peu réductrice, il pourrait s’inscrire dans les travaux sur les savoirs informels (Cristol et Muller, 2013) ou les « communautés d’apprentissage » (Cristol, 2017). Il est à l’œuvre plus sûrement encore, sans être explicitement formulé, dans les problématiques développées autour des rapports entre activité et apprentissage ou, plus largement, des savoirs liés à l’expérience (Barbier, 2013 ; Pastré, 2011). Pourtant, entrer par la NS suppose un changement de regard sur nos objets de recherche et un déplacement de nos focales lorsqu’il s’agit d’analyser l’activité humaine sous l’angle des apprentissages et du développement professionnel. Ici, on s’inscrit dans une anthropologie des savoirs (Adell, 2011), c’est-à-dire une approche portée par un intérêt particulier pour les savoirs en jeu dans les situations sociales, tant parce qu’ils signifient et impliquent dans le développement des sociétés que parce qu’ils se transforment, se différencient, changent leurs modes d’articulation. En somme, dans l’analyse, ce sont les savoirs qui sont au cœur de la réflexion. Ces savoirs sont mobilisés dans toutes les interactions et particulièrement celles qui concourent à construire du lien social et assurer sa pérennité. Il y a donc une dimension à la fois historique et une dimension politique, très souvent absente des travaux sur l’activité (Schwartz, 2021). Investi dans les sciences de l’éducation et de la formation, le concept prend une signification particulière que les contributions de ce dossier voudraient questionner.
Pour les Sciences de l’éducation et de la formation (SEF), il pourrait s’agir d’un concept clé pour apporter un éclairage nouveau sur des phénomènes comme le fonctionnement de la subjectivité dans l’activité, la tension entre l’épistémique et l’épistémologique dans la génération des savoirs, la diversité des savoirs en jeu dans les interactions sociales, la transmission dans les sociétés et les organisations humaines (Barbier, 2009 ; Barbier et Thievenaz, 2013 ; Carré, 2020 ; Dubet, 2016 ; Lax, 2023).
Plus globalement, ce sont des phénomènes aussi élémentaires que l’apprentissage ou la formation qui sont réinterrogés. En effet, en la matière, trop de fausses évidences sont insuffisamment questionnées dans notre travail de recherche et conceptualisation : des faits aussi « têtus » que la relation (Berbaum, 1984 ; Fabre, 1994) et le « déjà-là » dans l’apprentissage (Bachelard), la part du contexte dans la formation ou celle de l’expérience, le poids des normes et des valeurs dans l’orientation des activités (Schnapper, 2023) L’objectif n’est pas tant de déployer une nouvelle théorie de la formation que de travailler sur et avec ce concept afin d’en montrer son intérêt heuristique et les implications dans les pratiques de formation.
Il ne s’agit pas pour autant d’une clé universelle de compréhension des phénomènes et des faits habituellement traités par les SEF. Il s’agit d’une conception de l’activité centrée sur les savoirs qui y sont mobilisés, mais une conception extensive et non hiérarchisée des savoirs, qui s’intéresse à leur dynamique, faite d’interactions et de transformations, d’un rapport substantiel à l’activité et plus encore à l’expérience, individuelle et collective (Durrive, 2016 ; Thébault et al., 2014 ; Thievenaz, 2019).
Dans notre construction, la différenciation des savoirs est triple : savoirs de référence et savoirs d’expérience, savoirs théoriques et savoirs pratiques, savoirs d’autorité et savoirs autorisés. Ces oppositions se croisent et s’entrecroisent sans qu’il ne soit possible de les assimiler l’une à l’autre ou de les additionner. Ces savoirs interagissent à travers des discours, mais également des mises en œuvre, des attitudes et des collaborations (Becker et Leibovici, 2022). Ce qui fait apparaître le jeu de « traductions » diverses : des savoirs en discours, des discours en action, de savoirs en objets, de savoirs pratiques en savoirs de référence… De même que se font jour des discours d’autorité à l’adresse d’individus dont les savoirs sont moins autorisés (Baudrit, 2018) ; c’est le cas emblématique du discours managérial, mais également de l’expertise politique (la consultance) face à des citoyens en perte de sens et de repères (Coutrot et Perez, 2022 ; Rosanvallon, 2021).
Les configurations constituent en réalité des cadres qui vont entrer en action par la mise en mots et en actes. Ces rencontres alimentent leur circulation et, ainsi, leurs transformations (Albero, 2017). La référence à cette notion de configuration développée notamment par Norbert Elias en l’articulant à celle d’interdépendance (Elias, 1981 ; 1993), tout autant qu’à celle de registre évoque irrésistiblement aujourd’hui la « dramatique de l’usage de soi » (Schwartz) ou plus largement la dramatisation de l’existence, sa mise en intrigue. Cela n’est pas surprenant : « certaines questions anthropologiques et politiques les plus vives posées par la crise écologique sont des questions de dramaturgie et de scénographie : qui parle ? Qui distribue les rôles ? Qui a le pouvoir d’agir et comment ? Qui décide de l’occupation des territoires et la manière de se déplacer » (Aït-Touati, 2022, p. 5). Dans cette perspective, « l’enjeu critique » relevés par les deux anthropologues, c’est le « problème » dans les situations d’apprentissage ou, plus encore, ce qui enclenche des situations potentielles de développement (Mayen, 2009).
Les « communs » nous paraissent constituer une thématique révélatrice de l’actualité de la négociation des savoirs (Ostrom, 2010 ; Descola et Pignocchio, 2022). Les communs « ne sont pas seulement des biens (…) ou des ressources en libre accès », mais « un ensemble de relations sociales fondées sur un principe de justice » (Laurent, 2020, p. 77). La justice, en l’occurrence, est une condition de la collaboration. C’est la conviction de partager un même principe de justice qui crée la confiance, autre condition de la collaboration. Peu importe ici qu’il s’agisse de collaboration ou coopération ; ce qui importe, c’est de considérer que les personnes qui collaborent (ou coopèrent) portent en elles des savoirs différents et diverses conceptions de la mise en œuvre de valeurs. Fortes de leurs affects et leurs émotions, elles s’accordent sur l’implication d’un principe de justice dans la transaction et sont susceptibles de parvenir à faire évoluer, transformer, leurs savoirs respectifs (Barbier et Galatanu, 1998). Les individus qui coopèrent apprennent nécessairement des autres, à condition d’être prêts à mettre en question leurs propres savoirs. Les situations-problèmes sont justement celles qui incitent à cette mise en question. Bien sûr, il faut qu’une relation de collaboration se construise ; cela implique à la fois une attention l’un à l’autre, une réciprocité des attentes et la confiance. Celle-ci est liée à certains indices significatifs, le partage d’une temporalité, des éléments de langage, les usages spécifiques des outils mis en œuvre. À l’instar de « l’apprentissage expansif » (Engeström, 2008), cette collaboration construite autour d’un « enjeu critique » va évoluer en négociation des savoirs.
En somme, avec cette notion de négociation des savoirs, les SEC assument toujours davantage leur ancrage dans l’anthropologie, suivant la trace d’inspirateurs tels qu’Yves Schwartz (2000) ou Pierre Pastré (2011). L’entrée par l’activité et son analyse, déplace notre positionnement épistémique, l’activité devient le lieu nécessaire de génération de savoirs nouveaux et du développement des personnes (Bourgeois et Durand, 2012).
Les composantes d’une pratique sociale et la formation
Dans toute la mesure de la notion, la négociation des savoirs concerne des phénomènes sociohistoriques aussi divers que l’élaboration d’une politique éducative ou que la socialisation professionnelle des novices, l’alternance en formation autant que l’universitarisation des formations professionnelles (Rullac, 2016). Ces phénomènes majeurs dans l’histoire récente et l’évolution de l’humanité (Mbembe, 2023) se conjuguent pratiquement à travers des processus locaux plus ou moins durables. Cela peut être la professionnalisation des bénévoles dans une association, un projet de développement des compétences dans une organisation, la construction d’une monographie ou d’un projet de recherche par un stagiaire adulte de la formation diplômante, la démarche d’élaboration de son dossier de validation par un candidat à la VAE… L’analyse de ces processus permet d’identifier les ressources mobilisées dans la négociation, les modes d’interaction entre les parties prenantes et les instruments qui l’organisent, les modalités d’évaluation ou de reconnaissance qui instruisent la valeur qui y est en jeu (Barbier et Durand, 2006 ; Chiapello et Gilbert, 2013 ; Mayen et Olry, 2012).
Ces processus se déclinent eux-mêmes en situations. L’analyse de ces situations permet de mettre au jour la manière dont les individus « se débrouillent » dans l’interaction et la collaboration, de même que les savoirs effectivement mobilisés ou projetés dans les situations par ses partenaires, et la traduction particulière du besoin social auquel voudrait répondre l’activité dans ces situations (Mayen et Gagneur, 2017 ; Mayen et Macler, 2018). En ce sens, la « transposition didactique » à l’œuvre dans les classes (Chevallard, 1985) de même que les usages du portfolio dans des formations professionnelles (Clément et Durrive, 2022) procèdent incontestablement d’une NS.
Symétriquement, il convient de préciser qu’une situation emblématique d’une NS ne comporte de dynamique que parce que, peu ou prou, elle s’inscrit dans un processus, plus large et plus long. De même, la situation ne prend tout son sens que par rapport à un contexte historique de négociation de savoirs. À ce titre, par exemple, l’observation d’un stagiaire ou un étudiant en alternance dans un milieu hospitalier implique de considérer le processus formatif dual dans lequel elle s’insère, et notamment les ressources que mobilise chacun des deux systèmes, de production et de formation (formelle) ; mais également l’évolution du rapport à la santé et les transformations des rapports entre professionnels dans ce secteur (Parent et Jouquan, 2013).
Ainsi, la négociation des savoirs renvoie autant à des phénomènes sociohistoriques qu’à des processus inscrits dans des territoires, des organisations ou des actions de formation, et qu’à des situations singulières, sous l’angle des savoirs qui y sont mobilisés et transformés : aussi bien l’assimilation des peuples premiers par les colons dans le monde que l’administration d’un soin par un soignant dans un hôpital, le travail d’une Convention citoyenne sur le climat qu’une visite d’alternance dans une entreprise, l’accueil d’un client chez un réparateur automobile que l’élaboration d’un « évènement » entre une université et des entreprises… Pour nous, toutes ces activités impliquent nécessairement des apprentissages.
Un bel exemple de situation en la matière est le fonctionnement d’un jury de VAE (Houot et al., 2022). Dans l’optique de la NS, le jury de VAE peut être saisi comme une négociation comportant trois enjeux :
- Une négociation – dont l’enjeu est la validation – entre des savoirs d’expérience et des savoirs de référence dans la construction de son dossier, en général accompagnée par un conseiller « traducteur » ;
- Une négociation – dont l’enjeu est la reconnaissance – entre une trajectoire personnelle, d’emploi et de formation, et une institution garante de la valeur de ses certifications, au moment du jury ;
- Une négociation (dont l’enjeu est la valorisation, autant réelle que symbolique) entre un certain système de détermination de la valeur et un autre. Ces systèmes sont eux-mêmes le produit d’un travail historique d’élaboration des indices de valeur (croyances, mesure, classements sociaux) et une évolution historique de ce qui fait la valeur de l’activité (représentations sociales partagées et production de connaissances partagées).
Orientations possibles des contributions
Il convient de circonscrire le vaste champ de questionnement ouvert par ce concept de négociation des savoirs. Pour ce faire, il faut le restreindre à des questions et des objets habituellement travaillés en sciences de l’éducation et de la formation ; ici, particulièrement, les apprentissages induits par l’activité ouvrant sur un développement professionnel. À ce titre, ce dossier sera l’occasion de déployer et faire se croiser nos interrogations de chercheurs en SEF sur ce que nous pensons relever de la formation aujourd’hui. Dans cette perspective, notre préoccupation doit être de donner de la consistance à cette notion de négociation des savoirs et de mettre au jour son potentiel d’intelligibilité des faits de formation.
Quatre champs de pratiques seront abordés, considérant que, dans la réalité, ils se croisent et interagissent :
L’agir ensemble entre chercheurs et professionnels praticiens, entre chercheurs et usagers. En quoi la recherche est l’occasion de NS, entre les différents partenaires qui la soutiennent, en influençant son questionnement et ses résultats ? En quoi la dynamique même de la collaboration requise par la recherche oblige à composer avec les savoirs de l’autre, tant dans la formulation des questions, le choix de la méthodologie, les concepts mobilisés ou créés à cette occasion ? En quoi cette négociation concourt à orienter la professionnalisation du chercheur et, simultanément, l’identité épistémique des professionnels praticiens et/ou des usagers ?
L’agir ensemble entre formateurs et stagiaires étudiants, entre formateurs et sites professionnels. En quoi, la formation, notamment universitaire, est l’occasion de NS ? Celle-ci constitue, peut-être, à la fois la matière même de la formation ; elle organise des démarches et la conception de ses outils ; elle instruit la définition de ses objets et la manière d’en évaluer ses effets. La formation professionnelle des adultes engage également des négociations entre les étudiants stagiaires eux-mêmes, et leurs référents en milieu professionnel.
Des situations et des processus relevant de la NS dans le cadre d’institutions et d’organismes de formation. Cela peut concerner les formations dans un cadre universitaire, ou les grands organismes (AFPA, GRETA…) et moins grands organismes de formation. Il s’agit alors de prendre pour point de départ d’observation et d’analyse des situations formelles ou non formelles de formation. L’attention devrait être portée en particulier aux degrés de granularité de l’observation et de l’analyse en matière de savoirs mobilisés et de leurs évolutions respectives entre partenaires : entre un travail en groupe dans une formation à l’étude du fonctionnement d’une formation diplômante.
Des situations et des processus professionnels relevant de la NS hors d’un cadre formel et/ou institutionnel de formation :une consultation entre un professionnel de santé et un patient, une action de formation en situation de travail, une collaboration entre professionnels et chercheurs sur un projet de recherche… Il s’agit de prendre pour point de départ d’observation et d’analyse des situations et des processus particuliers dans le champ du travail, entre salariés et manageurs, entre salariés de différents statuts, genres, ou âges… Tous les organismes et institutions intermédiaires du marché du travail sont susceptibles d’être pris pour lieu d’observation. Il s’agit alors de prendre le temps de l’explicitation des savoirs en jeu dans ces situations et de s’intéresser à la manière dont la dynamique même de ces situations contribue à expliciter les savoirs en jeu et à les transformer chez leurs différentes parties prenantes ; en quoi ces transformations peuvent être interprétées comme des apprentissages, individuels et collectifs ? On s’intéressera notamment aux rapports de et au travail qui sont en jeu, rapports au savoir et à l’apprentissage ; mais également à la relation qui s’y constitue pour nouer entre elles les différentes configurations de savoirs.
Bibliographie indicative :
Adell, N. (2008). Anthropologie des savoirs. Armand Colin.
Aït-Touati, F. (2022). Pour un théâtre-laboratoire. Dans F. Aït-Touati et B. Latour, Trilogie terrestre (p. 5-13). Éditions B42.
Albero, B. (2017). La possibilité d’un commencement : une rencontre entre dispositions et configurations. Analyse d’écrits réflexifs d’apprenti.e.s chercheur.e.s. Éducation permanente, 210, 27-38.
Barbier, J.-M. (2009). Le champ de la formation de la formation des adultes. Dans É. Bourgeois, G. Chapelle, J.-C. Ruano-Borbalan (Dir.). Encyclopédie de la formation (p. 1-28). Presses universitaires de France.
Barbier, J.-M. (2013). Un nouvel enjeu pour la recherche en formation : entrer par l’activité. Savoirs, 33, 9-22.
Barbier, J-M., Galatanu, O. (1998). (Dir.). Action, affects et transformation de soi. Presses universitaires de France.
Barbier, J.-M., Durand, M. (2006). (Dir.). Sujets, activités, environnements. Presses universitaires de France.
Barbier, J.-M., Thievenaz, J. (2013). (Dir.). Le travail de l’expérience. L’harmattan.
Baudrit, A. (2018). Éducation et formation dans les sociétés contemporaines. Presses universitaires de la Méditerranée.
Becker, H.S., Leibovici, F. (2022). Exercices. AOC.
Berbaum, J. (1984). Apprentissage et formation. Presses universitaires de France.
Blanc, M. (2009). La transaction sociale : genèse et fécondité heuristique. Pensée plurielle, 20, 25-36.
Boltanski, L. (2009). De la critique. Gallimard.
Bourgeois, É., Durand, M. (2012). (Dir.). Apprendre au travail. Presses universitaires de France.
Callon, M. (1986). Éléments pour une sociologie de la traduction. L’année sociologique, 36, 169-208.
Callon, M., Latour, B. (1991). (Dir.). La science telle qu’elle se fait. La Découverte.
Carré, P. (2020). Comment les adultes apprennent ? Dunod.
Charlot, B. (1999). Le rapport au savoir. Anthropos.
Chevallard, Y. (1985). La transposition didactique. La pensée sauvage.
Chiapello, É, Gilbert, P. (2013). Sociologie des outils de gestion. La découverte.
Citton, Y. (2021). Faire avec. Conflits, coalitions, contagions. Les liens qui libèrent.
Clément, P., Durrive, L. (2022). Le récit d’activité dans un e-portfolio : un mode restitution dans une perspective de professionnalisation. Dans I. Houot, E. Triby et F. de Viron (Dir.), La restitution, entre activité et formation (p. 125-140), Octarès.
Coutrot, T., Perez, C. (2022). Redonner du sens au travail. Seuil.
Cristol, D. (2017). Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble, Savoirs, 43, 10-55.
Cristol, D., Muller, A. (2013). Les apprentissages informels dans la formation pour adultes. Savoirs, 32, 11-59.
Descola, P., Pignocchio, A. (2022). Ethnographies des mondes à venir. Seuil.
Dubet, F. (2016). Sociologie de l’expérience. Seuil (2e éd.).
Durrive, L. (2016). Compétence et activité de travail. L’harmattan.
Engeström, Y. (2008). Quand le centre se dérobe : la notion de ‘knotworking’ et ses promesses. Sociologie du travail, 50(3), 303-330.
Elias, N. (1981). Qu’est-ce que la sociologie ? Fayard.
Elias, N. (1993). Engagement et distanciation. Fayard.
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Gagneur, C-A. et Mayen, P. (2010). Le territoire est-il une situation de développement ? Éducation permanente, 184, 63-77.
Houot, I., Triby, E., Viron de, F. (2022). (Dir.). La restitution. Octarès.
Lahire, B. (2017). Genèse des dispositions et commencements. Éducation permanente, 210, 19-25.
Latour, B. (2005). La science en action. Introduction à la sociologie des sciences. La découverte (2e édition).
Laurent, É. (2020). Économie pour le XXIe siècle. Manuel des transitions justes. La découverte.
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Martucelli, D. (2017). La condition de l’homme moderne. Gallimard.
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Mayen, P., Olry, P. (2012). Expérience du travail et développement pour de jeunes en formation professionnelle. Recherche et formation, 70, 91-106.
Mayen, P. Gagneur, C.A. (2017). Le potentiel d’apprentissage des situations : une perspective pour la conception de formations en situations de travail. Recherches en éducation, 28, 70-83.
Mayen, P., Macler, S, (2018). Travailler et se former. Éditorial. Éducation permanente, 216, 5-12.
Mbembe, A. (2023). La communauté terrestre. La découverte.
Ostrom, E. (2010). Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles. De Boeck.
Parent, F., Jouquan, J. (2013). (Dir.). Penser la formation des professionnels de santé. De Boeck.
Pastré, P. (2011). La didactique professionnelle. Approche anthropologique du développement chez les adultes. Presses universitaires de France.
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Schnapper, D. (2023). La relation à l’autre. Gallimard.
Schwartz, Y. (2000). Le paradigme ergologie ou un métier de philosophe. Octarès.
Schwartz, Y. (2021). Travail, ergologie et politique. La dispute.
Thébault, J., Delgoulet, C., Fournier, P. S., Gaudart, C., Jolivet, A. (2014). La transmission à l’épreuve des réalités du travail. Éducation permanente, 198, 85-99.
Thiévenaz, J. (2019). Enquêter et apprendre au travail. Raisons et passions.
Winck, D. (2007). Science et société. Sociologie du travail scientifique. Armand Colin.
Wolton, D. (2022). Communiquer, c’est négocier. Éditions du CNRS.
Calendrier prévisionnel (pour une parution en 2026) :
- Appel à textes et diffusion dans les réseaux : 1er novembre 2023
- Transmission d’une proposition d’article sous la forme d’un résumé (1 page à 1 page 1/2) par l’auteur aux coordonnateurs du numéro au plus tard pour le 1er février 2024
- Transmission par les coordonnateurs à l’auteur de la réponse à la proposition d’article : 1er mars 2024
- Transmission du texte par l’auteur aux coordonnateurs du numéro au plus tard pour le : 1er octobre 2024
- Transmission des textes aux évaluateurs par l’équipe éditoriale de la revue Phronesisau plus tard pour le 1ernovembre 2024
- Retours des évaluations transmises aux coordonnateurs du numéro avec en copie le directeur de la revue au plus tard pour le 1er avril 2025
- Transmission par le directeur de la revue de la grille de synthèse des évaluations aux auteurs au plus tard pour le 1er juin 2025.
- Transmission des textes révisés aux coordonnateurs du numéro avec en copie le directeur de la revue au plus tard pour le 1er novembre 2025
- Décision de la revue Phronesis (en collaboration avec les coordonnateurs du numéro : 15 décembre 2025
- Publication envisagée : dernier trimestre 2026 ou premier semestre 2027
CONSIGNES AUX AUTEURS-ES
Règles générales :
Les auteurs intéressés sont invités à soumettre leur résumé pour le 15 janvier 2024 et le transmettre aux deux coordonnateurs du numéro :
elzbieta.sanojca@univ-rennes2.fr
et simultanément à la revue Phronesis (en indiquant dans le message le titre du numéro thématique) et au directeur de la revue :
Philippe.Maubant@USherbrooke.ca
Dans une seconde étape, et sous réserve que leur résumé ait été accepté, les auteurs sont priés de soumettre leur texte dans deux versions : l’une anonymée et la seconde non anonymée. Ils sont invités à indiquer :
- Le titre de l’appel à communication visé ;
- Leur institution d’appartenance et laboratoire d’attache ;
- Leur adresse électronique professionnelle exclusivement.
Ils doivent vérifier qu’aucun élément présent dans le texte anonymé ne permet de les identifier (références dans le texte et bibliographie, mais également dans certaines rubriques de Word [propriétés du document]). Il en est de même pour la transmissiondes tableaux, des schémas et des figures, qui doivent être transmis en fichiers séparés. Les auteurs sont invités à indiquer pour toute soumission le titre de l’appel à communication visé (titre provisoire du numéro).
Pour tout message avec l’équipe éditoriale de la revue, merci de préciser dans le message le titre du numéro thématique.
Les textes sont transmis en format Word uniquement (sur PC ou Mac).
Les textes doivent respecter les normes de présentation de l’American Psychological Association (APA), dernière version et adaptées en français pour répondre aux normes linguistiques en usage : https://bib.umontreal.ca/citer/styles-bibliographiques/apa
La longueur de chaque chapitre sera de 80 000 caractères « max » (espaces compris), en excluant le titre, les résumés en français et en anglais, les mots-clés en français et en anglais et la bibliographie.
Les textes sont présentés à interligne simple.
La police de caractères utilisée est GARAMOND (taille 11) ou AVENIR (taille 11).
PRÉSENTATION DES FIGURES, SCHÉMAS ET DES TABLEAUX :
- Les tableaux, figures ou schémas sont limités à un maximum d’un par article et par catégorie, autrement dit un tableau et/ou une figure et/ou un schéma par article. Un tableau, comme une figure ou un schéma, ne doit pas dépasser une demi-page. Un tableau, comme une figure ou un schéma, doit être lisible, légendé et référencé. Il en est de même pour les figures et les schémas. La légende doit être indiquée en dessous du tableau, de la figure ou du schéma.
- Ils doivent être transmis en format JPEG, TIFF, PDF ou PNG.
- Les auteurs indiquent dans le texte l’emplacement des schémas, des tableaux et/ou des figures à insérer. Ils les joignent en annexe dans des fichiers séparés et avec toutes les indications quant à la composition de ces documents.
- L’équipe éditoriale de la revue se réserve le droit de supprimer tout tableau, tout schéma ou toute figure jugée illisible et susceptible de nuire à la compréhension de l’argumentaire.
HIÉRARCHISATION DES TITRES :
- Trois niveaux de titre sont permis.
- Numéroter les titres et les sous-titres afin de bien en préciser la hiérarchie (ex. : 1., 1.1., 1.1.1.).
FORMAT D’ÉCRITURE :
- Utiliser l’italique uniquement pour les mots étrangers, termes latins et grecs et les titres d’ouvrages si ces titres sont référencés dans le corps du texte.
- Utiliser le gras uniquement pour les titres et les sous-titres.
ÉCRITURE DES NOMBRES :
- Les nombres de 0 à 10 (inclus) sont toujours écrits en lettres, que ces nombres soient au début ou à l’intérieur d’une phrase.
- À partir de 11, les nombres sont écrits en chiffres dans les phrases ; s’ils sont au début d’une phrase, ils sont écrits en lettres.
- S’il y a une énumération de plusieurs catégories évoquant des nombres différents dans une même phrase, tous les nombres sont écrits en chiffres.
- Les nombres inférieurs à zéro, les fractions, les rapports et les pourcentages s’écrivent toujours en chiffres.
CITATIONS DANS LE TEXTE ET RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES :
Elles doivent respecter les normes APA 7e édition (version francophone sans esperluette) :
https://bib.umontreal.ca/citer/styles-bibliographiques/apa
Pour la bibliographie insérée dans le texte, il est demandé impérativement qu’elle ne soit pas articulée ou liée à la bibliothèque numérique de l’auteur.